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Le Nouvel Ordre se rapproche : impôt « sur les revenus » sans précédent et autres changements clés

Le 1er octobre 2021, la Diète de la République de Pologne (Sejm) a approuvé un projet de loi appelé « Nouvel Ordre polonais ». La proposition de loi va maintenant être examinée par le Sénat. Enfin, la plupart des nouvelles règles devraient entrer en vigueur à partir du 1er janvier 2022.

Bien qu'il s'agisse d'un paquet fiscal d’aide post-pandémie, le projet de loi prévoit de nombreux changements dans le domaine de l'impôt sur les sociétés et de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, ce qui pourrait conduire à une augmentation du taux d'imposition effectif en Pologne.

Nous présentons ci-dessous un bref aperçu des principaux changements qui devraient être pris en compte lors de l'examen des règlements fiscaux en Pologne à partir de 2022.

4 points clés sur l’impôt « sur les revenus » sans précédent

Le Nouvel Ordre introduit un impôt dit « sur les revenus » ou « impôt minimal ».

1. Le nouvel impôt sera levé sur les entreprises contribuables de l'impôt sur les sociétés (IS) et les groupes de capital fiscal :

  • qui subissent une perte fiscale ou
  • dont le ratio revenu fiscal / recettes est inférieur à 1 % ; aux fins du calcul du ratio, les coûts de développement ou d'acquisition d'actifs fixes, y compris les amortissements, seront exclus.

Bien que le projet de loi prévoie certaines exclusions (voir ci-dessous), il ne limite pas l'application du nouvel impôt aux entreprises dépassant un certain seuil de revenus.

2. Le nouveau taux d'imposition serait de 10 %, tandis que la base d'imposition serait calculée comme suit :

  • 4 % des revenus de l'entreprise (autres que les gains en capital) plus
  • somme des dépenses passives « excessives » (en général les coûts des services intangibles de financement intra-groupe et des redevances ainsi que certaines positions d'actifs d'impôts différés).

3. Des exclusions pourraient s'appliquer notamment aux institutions financières (définition spécifique sur le champ de l'IS), aux entreprises bénéficiant des zones économiques spéciales (mais le champ d'application de l'exclusion n'est pas clair), aux nouvelles entreprises (pendant les trois premières années), aux entreprises ayant subi une baisse de 30 % de leurs revenus au cours de l'année précédente, aux entreprises ayant une structure de propriété simple et aux entreprises payant l'IS dit estonien.

4. L’ impôt « sur les revenus » peut être déduit d'un IS « standard ».

Nouvel impôt sur les « bénéfices transférés » / « revenus transmis » 

L'amendement prévoit l'imposition des « bénéfices transférés », c'est-à-dire les coûts encourus (directement ou indirectement) envers des entités liées. Dans ce cas, le terme « coûts » couvre notamment les coûts des services immatériels (par exemple, conseil, marketing, gestion), les redevances, le coût du financement par l’emprunt, les coûts liés au transfert des fonctions, des actifs ou des risques (frais de sortie).

L'impôt sur les bénéfices transférés (IBT) s'appliquerait aux paiements effectués directement ou indirectement à une partie liée qui paie effectivement un impôt inférieur de 25 % à l'impôt hypothétique qui serait dû en cas d'application du taux de 19 % (taux standard de l'IS en Pologne). Certaines conditions supplémentaires concernant la manière dont les paiements reçus sont attribués ou traités à des fins fiscales par le bénéficiaire doivent également être remplies.

La réglementation s'appliquera si les coûts susmentionnés payables aux entités liées et non liées dépassent 3 % de la somme des coûts déductibles fiscalement au cours d'une année donnée. Le taux d'imposition applicable aux bénéfices transférés est de 19 % et la charge fiscale pèse sur la société polonaise qui effectue le paiement.

Les dispositions ci-dessus ne s'appliqueront pas aux paiements effectués à une société liée basée dans l'UE ou l'EEE (c'est-à-dire que les sociétés britanniques et suisses ne seront pas couvertes par cette exclusion), si elle exerce une « activité commerciale réelle et significative », bien que l'interprétation de cette phrase par rapport aux bénéficiaires « directs / indirects » ne soit pas claire.

4 changements clés de la retenue à la source – assouplir le régime mais sous conditions 

Réduction du champ d'application du mécanisme de « paiement et de remboursement »

Le mécanisme de « paiement et de remboursement » de la RAS (obligation de retenir l'impôt sur les paiements dépassant 2 millions de PLN par contribuable et par an, indépendamment des directives de l'UE et des conventions de double imposition) :

  • sera limité aux paiements effectués à des entités liées (actuellement, il s'applique également aux entités non liées) ;
  • sera limité aux flux dits passifs (par exemple, intérêts, dividendes, redevances) et ne concernera pas – comme dans la réglementation actuelle – les paiements pour des services intangibles (par exemple, la gestion) ;
  • ne concernera pas les paiements effectués entre résidents fiscaux polonais.

Décision fiscale anticipée sur la RAS

L'application de l'avis de sécurité (premier mécanisme permettant de ne pas retenir l'impôt sur les paiements dépassant 2 millions de PLN par an et par contribuable) sera également possible pour les paiements bénéficiant d'une exonération ou d'un taux réduit en vertu d'une convention de double imposition (actuellement, cette possibilité n'existe que pour les paiements bénéficiant d'une exonération de la RAS en vertu des directives « mères-filiales » et I+R).

Déclaration du conseil d'administration

La déclaration permettant de ne pas percevoir la RAS (deuxième mécanisme permettant de ne pas retenir l'impôt sur les paiements dépassant 2 millions de PLN/an/contribuable) sera signée conformément aux règles de la représentation de la société polonaise redevable (actuellement, elle doit être signée par tous les membres du conseil d'administration).

Règle de substitution

Nouvelle disposition permettant de considérer un paiement comme soumis au mécanisme de « paiement et de remboursement », s'il n'a pas été classé comme tel par un contribuable sans raison économique valable. Le champ d'application de cette règle est incertain, mais elle peut potentiellement couvrir les transferts de type non-dividende (par exemple, le rachat) lorsque la société est en situation de verser des dividendes.

Non déductibilité fiscale du « dividende caché » dès le 1er janvier 2023

Le projet annonce une réglementation visant à empêcher les sociétés de distribuer des bénéfices sous forme de dividendes dits « cachés » à leurs actionnaires ou à des entités liées directement ou indirectement aux contribuables ou à leurs actionnaires.

Le champ d'application de l'exclusion est très large et a été fortement critiqué au cours du processus législatif. À ce stade, une vacatio legis annuelle pour cette disposition a été établie, ce qui signifie qu'elle entrera en vigueur le 1er janvier 2023 et qu’entre-temps sa formulation est censée être clarifiée et corrigée.

 Nouvelles limites pour les coûts de financement

La sphère de sécurité (safe harbour) pour la limitation des coûts de financement de la dette sera fixée à 3 millions de PLN (environ 600 000 EUR) ou à 30 % de l'EBITDA fiscal (et non à 3 millions de PLN + 30 % de l'EBITDA, comme c'est le cas sur la base des dispositions actuelles et de leur interprétation par les tribunaux administratifs). Dans le pire des cas, la modification entraînerait une augmentation des coûts non déductibles fiscalement de 3 millions de PLN par an (environ 135 000 EUR).

Les coûts du financement par emprunt reçu d'entités liées pour l'achat ou l'acquisition d'actions / de participations dans d'autres entités ne seront pas déductibles fiscalement.

Aucune disposition transitoire (qui pourrait mettre en discussion les intérêts sur les prêts déjà accordés) n'est prévue.

Amortissement des biens immobiliers

Nouvelles règles concernant l'amortissement dans les sociétés immobilières – obligation d'adapter les taux d'amortissement fiscal à ceux utilisés à des fins comptables ; si, à des fins comptables, un bien donné est traité comme un investissement sur lequel des amortissements comptables ne sont pas effectués, ce traitement peut également entraîner l'absence d'amortissement fiscal (par rapport à la rédaction actuelle des dispositions, la modification est de nature révolutionnaire et fortement défavorable aux sociétés immobilières).

En outre, le Nouvel Ordre prévoit que les propriétés résidentielles ne feront pas l'objet d'amortissements fiscaux, mais que la vacatio legis (jusqu'au 31.12.2022) sera applicable aux propriétés acquises avant le 31.12.2021.

 Nouvelles règles concernant les réorganisations

Le Nouvel Ordre polonais prévoit la modification des règles sur la neutralité fiscale de certaines réorganisations concernant des sociétés polonaises (scissions, fusions, échange d'actions) et introduit également une « taxe de sortie » sur les réorganisations transfrontalières.

Société holding polonaise – nouveau régime favorable, mais règles d'entrée strictes

Dans le cadre du régime polonais des sociétés holding, les sociétés polonaises peuvent bénéficier, entre autres, d'une exonération de participation lors de la cession d'actions dans une filiale nationale ou étrangère (non immobilière) et d'une exonération de 95 % des dividendes entrants. Toutefois, le projet prévoit plusieurs conditions concernant à la fois la société holding et sa filiale qui doivent être remplies pour bénéficier du régime.

Changements dans l'imposition des revenus des employés

Suppression de la possibilité de déduire les cotisations d'assurance maladie de l'impôt – actuellement, une partie des cotisations d'assurance maladie payées (7,75 %) est déductible de l'impôt. En cas de mise en œuvre du changement discuté, l'obligation fiscale sera augmentée ainsi que les coûts de rémunération (sur une base mensuelle et annuelle).

Le project prevoit :

  • Allégement fiscal pour les employés – à appliquer sur une base mensuelle et annuelle. Cet allégement sera applicable à la rémunération brute mensuelle jusqu'à 11 500 PLN.
  • Augmentation du montant exonéré d'impôt – jusqu'à 30 000 PLN par an.
  • Augmentation du seuil d'imposition – jusqu'à 120 000 PLN par an (un taux d'imposition plus élevé de 32 % sera appliqué au revenu annuel cumulé dépassant le niveau de 120 000 PLN au lieu de 85 528 PLN).

Documentation

Télécharger 2021.10_Tax_alert_-_Nouvel_Ordre.pdf  (PDF • 723 Ko)
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